2021-0908201C6 Vente d'un bien détenu en copropriété par indivisi

Please note that the following document, although believed to be correct at the time of issue, may not represent the current position of the CRA. Prenez note que ce document, bien qu'exact au moment émis, peut ne pas représenter la position actuelle de l'ARC.

Principal Issues: Quel est le traitement fiscal du gain en capital réalisé par des conjoints copropriétaires indivis à la vente d'un immeuble ? - What is the tax treatment of a capital gain realized by spouses who are undivided co-owners on the sale of their real estate property?

Position: Le traitement fiscal dépendra des opérations juridiques selon le droit privé. En prenant l'hypothèse que l'un des conjoints a fait un don ou un prêt d'argent à l'autre conjoint, les règles d'attribution devraient s'appliquer - Tax treatment will depend on what are the legal transactions under private law. Based on the assumptions that one of the spouses made a donation or a loan to the other spouse, attribution rules should apply.

Reasons: Don ou prêt entre conjoints. / Donation or loan between spouses.

Author: Ostiguy, Michel
Section: 40(1)(a); 54 "prix de base rajusté", "produit de disposition"; 69(1); 73(1), (1.01); 74.1(1), (2); 74.2(1); 74.5(1), (2); 74.5(11); 248(5); CCQ 1015, 1824, 2847.

TABLE RONDE SUR LA FISCALITÉ FÉDÉRALE DU 7 OCTOBRE 2021
APFF - CONGRÈS 2021

13. Vente d’un bien détenu en copropriété par indivision

A et B sont des conjoints.

A et B sont copropriétaires d’un chalet qu’ils ont acquis pour 400 000 $ en 2010. Le contrat d’achat et leur convention d’indivision ne comportent aucune mention sur la quote-part indivise de chacun. Selon l’article 1015 du Code civil du Québec (footnote 1) , ils sont donc présumés détenir chacun 50 % du chalet. La mise de fonds de 100 000 $ a été payée uniquement par A.

Pour le solde, A et B ont obtenu un emprunt hypothécaire de 300 000 $, dont chacun est solidairement responsable auprès de l’institution prêteuse.

Au moment de l’achat, les conjoints ont conclu une convention d’indivision qui prévoit qu’entre eux, chacun sera responsable de rembourser la moitié de l’emprunt hypothécaire. Par conséquent, chacun devra assumer 50 % de tout versement fait au prêteur, que ce soit en capital ou en intérêt, incluant tout remboursement anticipé.

A et B ont vendu leur chalet en avril 2021, au prix de 700 000 $ et sans commission de vente. Le prêt hypothécaire a été remboursé en totalité avant cette vente (chacun 50 %). Aucun des conjoints ne réclamera l’exemption pour résidence principale.

Première situation : la convention d’indivision ne prévoit aucune clause particulière portant sur un éventuel partage du prix en cas de vente du chalet.

À défaut d’entente à cet égard, le prix de vente du chalet a été réparti comme suit entre les deux conjoints :

* A (50 %) : 350 000 $
* B (50 %) : 350 000 $

Quant au prix de base rajusté (« PBR ») de chacun, il devrait être réparti comme suit :

* A (50 %) : 200 000 $
* B (50 %) : 200 000 $

Deuxième situation : la convention d’indivision prévoit qu’en cas de vente du chalet, le prix de vente net sera plutôt réparti comme suit entre les deux conjoints :

* A : droit prioritaire de recevoir la somme de 100 000 $ (la mise de fonds), plus un rendement établi d’avance.
* A et B : ensuite, chacun a droit de recevoir 50 % du solde du prix de vente net.

Questions à l’ARC

a) Dans la première situation, puisque la mise de fonds a été entièrement payée par A, ce dernier sera considéré avoir effectué, au moment de l’achat, une donation de 50 000 $ en faveur de B (50 % × 100 000 $). Cette donation sera-t-elle assujettie à la règle d’attribution du paragraphe 74.2(1) de la L.I.R. (gain en capital)?

    Le PBR de chacun pourrait-il plutôt être réparti comme suit :

    A : 250 000 $ (100 000 $ + (50 % × 300 000 $))
    B : 150 000 $ (50 % × 300 000 $)

b) Dans la deuxième situation, est-ce que l’ARC est d’avis que, conformément à l’article 1015 C.c.Q., chacun devra déclarer en 2021 le produit de disposition et le PBR suivants :

    A (50 %) : 350 000 $ - 200 000 
    B (50 %) : 350 000 $ - 200 000 $

Est-il alors raisonnable de conclure qu’au terme du versement prioritaire de 100 000 $ à A, cela comprend en réalité le remboursement par B d’un prêt qui lui a été consenti par A au moment de l’achat, qui correspond à 50 % de la mise de fonds de 100 000 $, soit 50 000 $. Par ailleurs, le rendement versé à A sur 50 % de la mise de fonds sera-t-il considéré comme un revenu pleinement imposable pour A en 2021 (revenu d’intérêt)?

Réponse de l’ARC

Le droit fiscal est un droit accessoire dont les effets reposent sur les droits et obligations qui découlent du droit privé applicable, notamment quant aux effets des contrats. Le droit fiscal n’intervient donc généralement que pour déterminer les conséquences fiscales découlant des effets des opérations contractuelles.

Dans les deux situations décrites, le traitement fiscal dépendra de l’analyse qui pourra être faite des opérations réalisées et de leurs effets juridiques pour les parties, selon le droit privé applicable, en l’occurrence le droit civil québécois. Nous présumons en effet que ces opérations juridiques sont régies par le droit applicable dans la province de Québec, soit le Code civil du Québec.

Les questions de déterminer si des indivisaires le sont en parts égales et si une mise de fonds inégale constitue une donation, un prêt ou autre transfert sont des questions de droit et de fait, à l’égard desquelles l’ARC ne donne pas d’interprétation. Il n’est pas du ressort de l’ARC, en effet, de procéder à l’analyse juridique qui devrait être faite à l’égard des opérations décrites. Ces questions ne pourraient être éventuellement tranchées que dans le cadre d’une vérification ou d’une demande de décisions anticipées (soumise conformément aux modalités prévues dans la Circulaire d’information IC 70-6R11 (footnote 2) ) à l’égard d’opérations projetées.

Nous pouvons cependant poser certaines hypothèses afin de donner des commentaires généraux à l’égard du traitement fiscal applicable qui pourraient s’avérer utiles en fonction de ces situations hypothétiques.

Hypothèses

Au préalable, nous présumons que les parts indivises dans le chalet ne sont des biens amortissables ni pour A ni pour B. Nous présumons également que A et B sont résidents canadiens et conjoints de fait durant toute la période décrite.

Dans les première et deuxième situations, il semble raisonnable de supposer que la présomption prévue à l’article 1015 du C.c.Q., en l’absence de toute indication de fait contraire, pourrait être applicable, de sorte que les parts des indivisaires A et B dans le chalet seraient effectivement égales. En effet, même dans la deuxième situation, le fait que la convention d’indivision fasse mention d’une somme qui devrait être payée prioritairement à A, à même le produit de la vente, à titre de « rendement », semble indiquer l’existence d’un prêt plutôt que de différentes quotes-parts dans l’immeuble.

Dans la première situation, en l’absence de toute indication relative à la réalisation d’un prêt par A au conjoint B, il semble plausible que la mise de fonds de 100 000 $ (« mise de fonds ») faite par A au moment de l’achat du chalet serait une libéralité faite au conjoint pour la moitié de cette somme. Dans la deuxième situation, comme nous l’avons évoqué précédemment, la mention d’un rendement sur la mise de fonds payée initialement par A semble indiquer la présence d’un prêt.

Pour les fins de nos commentaires, nous poserons donc l’hypothèse que, dans la première situation, A a versé la mise de fonds pour lui-même et son conjoint, faisant don de la moitié de cette somme à B.

Nous poserons également l’hypothèse que, dans la deuxième situation, A a versé la mise de fonds pour lui-même et son conjoint, prêtant à B la moitié de cette somme.

Finalement, dans la deuxième situation, nous poserons l’hypothèse que le rendement sur le prêt consenti quant à la moitié du montant de la mise de fonds constitue de l’intérêt.

Nos commentaires

L’expression PBR est définie à l’article 54 L.I.R. Selon l’alinéa b) de cette définition, le PBR d’un bien qui n’est pas un bien amortissable est égal au coût du bien pour le particulier, rajusté conformément à l’article 53 L.I.R.

Le terme « coût » n’est pas défini dans la Loi de l’impôt sur le revenu. Lorsqu’un bien est acquis en indivision, l’ARC est d’avis que le coût du bien pour un contribuable est le coût de sa part indivise dans le bien.

Lorsque la mise de fonds d’un contribuable est payée au moyen d’un don, d’une somme d’argent ou d’un prêt qu’il a par ailleurs reçu (ou est considéré avoir reçu), cette mise de fonds fait partie du coût de sa part indivise dans le bien.

Étant donné les hypothèses que nous avons posées, il ne serait pas possible d’établir le PBR des parts indivises de chacun des conjoints en considérant que la mise de fonds soit entièrement incluse dans le coût d’acquisition de la part indivise de A.

Dans les deux situations, le gain en capital réalisé par A et B devrait donc correspondre pour chacun à l’excédent du produit de disposition de sa part indivise dans l’immeuble sur le PRB de ce bien, étant entendu que ceux-ci ayant des parts indivises égales auront des produits de disposition et PBR égaux.

Il faudrait ensuite, dans un deuxième temps, tenir compte de l’application de la règle d’attribution prévue au paragraphe 74.2(1) L.I.R. étant donné que A, au moment de l’acquisition de l’immeuble, a transféré ou prêté un bien à son conjoint, soit une somme de 50 000 $ et que, au moment de la vente du chalet, B réalisera un gain en capital sur le bien substitué à cette somme.

En effet, le paragraphe 74.2(1) L.I.R. prévoit, entre autres, que lorsqu’un particulier prête ou transfère un bien, directement ou indirectement, à une personne qui est son époux ou conjoint de fait, le gain en capital imposable réalisé (ou la perte en capital déductible subie) par le conjoint bénéficiaire lors de la disposition du bien prêté ou transféré ou d’un bien y substitué est réputé être le gain en capital imposable ou la perte en capital déductible du particulier.

Eu égard à la deuxième situation, où il est question d’un prêt, le paragraphe 74.2(1) L.I.R. trouverait également application et ce, malgré le droit prioritaire de A de recevoir la somme de 100 000 $ (en considération de la mise de fonds effectuée par A), plus un rendement établi d’avance. En effet, le paragraphe 74.5(2) L.I.R. prévoit que les paragraphes 74.1(1) et 74.1(2) L.I.R. et l’article 74.2 L.I.R. ne s’appliqueront à aucun prêt dont les intérêts sont calculés à un taux supérieur ou égal au moindre des taux suivants :

* le taux prescrit;

* le taux dont seraient convenues, dans des circonstances semblables, des parties n’ayant entre elles aucun lien de dépendance,

à la date où le prêt est consenti (alinéa 74.5(2)a) L.I.R.), pourvu que tous ces intérêts soient payés au plus tard 30 jours après la fin de chaque année civile où ils sont devenus exigibles (alinéas 74.5(2)b) et c) L.I.R.).

Il semble clair que l’intérêt prévu sur le prêt effectué dans la deuxième situation n’aurait pas été payé dans les délais prévus à l’alinéa 74.5(2)c) L.I.R. pour toutes les années précédant l’année de la disposition. Le paragraphe 74.5(2) L.I.R. ne serait donc pas applicable.

Donc, dans les première et deuxième situations, et sous réserve de l’application du paragraphe 74.5(11) L.I.R., la règle d’attribution prévue au paragraphe 74.2(1) L.I.R. serait applicable et le quart du gain en capital imposable réalisé par le conjoint B, correspondant à la proportion du montant donné ou ayant fait l’objet d’un prêt par A à B sur le coût d’acquisition, pour B, de sa part indivise de l’immeuble (50 000 $ / 200 000 $), serait attribuable à A.

Ajoutons finalement que, dans la deuxième situation, les intérêts versés à A à même le produit de la vente du chalet, relativement au prêt fait à B pour la mise de fonds, seraient imposables pour A en vertu de l’alinéa 12(1)c) L.I.R.


Michel Ostiguy
Le 7 octobre 2021

FOOTNOTES

En raison des exigences de nos systèmes, les notes de bas de page contenues dans le document original sont reproduites ci-dessous :

1 RLRQ (« C.c.Q. »).

2 AGENCE DU REVENU DU CANADA, Circulaire d’information IC70-6R11 « Décisions anticipées et interprétations techniques en impôt », 1 avril 2021 (en ligne : https://www.canada.ca/fr/agence-revenu/services/formulaires-publications/publications/ic70-6.html).

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